L’acné excoriée - Santé et Maladie

L’acné excoriée

L'acné excoriée : Comprendre et traiter cette dermatose psychocutanée

Peau avec problèmes dermatologiques

L'acné excoriée, également appelée acné excoriée des jeunes filles ou dermatillomanie, est une affection cutanée particulière qui se situe à l'intersection entre dermatologie et psychiatrie. Cette pathologie souvent méconnue peut avoir des conséquences importantes sur la qualité de vie des patients. Cet article explore en détail tous les aspects de cette condition.

Définition et généralités

L'acné excoriée est définie comme une forme d'acné caractérisée par des lésions provoquées par le grattage, le triturage ou le pincement compulsif de boutons souvent minimes, voire parfois inexistants. Cette pathologie s'inscrit dans le cadre des troubles psychocutanés et des comportements répétitifs centrés sur le corps (CRCC).

À savoir : Le terme "excoriée" vient du latin "excoriare" qui signifie "écorcher". Il désigne précisément l'action de gratter ou d'arracher la peau.

Épidémiologie

L'acné excoriée touche principalement :

  • Les adolescents et jeunes adultes (pic entre 15 et 25 ans)
  • Majoritairement des femmes (ratio de 3:1 par rapport aux hommes)
  • Les personnes souffrant de troubles anxieux ou de perfectionnisme

Diagnostic de l'acné excoriée

Examen dermatologique

Critères diagnostiques

Le diagnostic est principalement clinique et repose sur :

  • Présence de lésions d'acné (souvent minimes) associées à des excoriations
  • Comportement compulsif de grattage rapporté par le patient
  • Localisation préférentielle sur les zones accessibles (visage, dos, thorax)
  • Signes de chronicité (cicatrices, hyperpigmentation post-inflammatoire)

Diagnostic différentiel

Il convient d'éliminer :

  • Acné sévère avec lésions de grattage secondaires
  • Dermatite artefactuelle
  • Prurigo
  • Infections cutanées (impétigo, herpès)
  • Autres troubles psychocutanés (trichotillomanie, onychophagie)

Symptômes et manifestations cliniques

Manifestations cutanées

  • Lésions excoriées (croûtes, érosions)
  • Cicatrices atrophiques ou hypertrophiques
  • Hyperpigmentation post-inflammatoire
  • Parfois surinfection des lésions

Manifestations psychologiques

  • Sentiment de perte de contrôle face au grattage
  • Anxiété ou tension avant le grattage
  • Soulagement ou plaisir pendant l'acte
  • Culpabilité ou honte après l'épisode
Attention : L'acné excoriée peut être associée à d'autres troubles psychiatriques comme la dépression, les troubles anxieux ou les troubles obsessionnels compulsifs (TOC).

Bilans et examens complémentaires

Bilan dermatologique

  • Examen clinique complet de la peau
  • Évaluation de la sévérité de l'acné sous-jacente
  • Recherche de complications (infections, cicatrices)

Bilan psychologique

  • Évaluation des comorbidités psychiatriques
  • Questionnaires spécifiques (Skin Picking Scale)
  • Recherche de facteurs déclenchants ou aggravants

Examens complémentaires

Généralement inutiles sauf en cas de doute diagnostique :

  • Prélèvement bactériologique en cas de surinfection
  • Biopsie cutanée exceptionnellement

Traitements de l'acné excoriée

Traitements dermatologiques

Traitements dermatologiques

  • Traitement de l'acné sous-jacente : rétinoïdes topiques, antibiothérapie locale ou générale selon la sévérité
  • Cicatrisation des lésions : soins locaux avec antiseptiques, pansements cicatrisants
  • Prévention des cicatrices : silicone, laser, dermabrasion selon le type de cicatrice

Traitements psychologiques et comportementaux

  • Thérapie cognitivo-comportementale (TCC) : traitement de référence
  • Techniques de renversement d'habitude : prise de conscience, compétition motrice
  • Thérapies d'acceptation et d'engagement (ACT) : gestion des émotions déclenchantes
  • Biofeedback : pour augmenter la conscience des comportements

Traitements médicamenteux psychotropes

  • Inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS) : fluoxétine, sertraline, etc.
  • Autres antidépresseurs : clomipramine
  • Antipsychotiques atypiques : à faible dose dans certains cas
  • N-acétylcystéine : modulateur glutamatergique prometteur
Approche intégrative : Le traitement optimal combine généralement plusieurs approches (dermatologique, psychologique et pharmacologique) adaptées à chaque patient.

Conseils et recommandations

Alimentation saine

Pour les patients

  • Tenir un journal des épisodes de grattage (heure, contexte, émotions)
  • Mettre en place des stratégies de diversion (balles antistress, dessin)
  • Soins cutanés doux pour limiter l'inflammation
  • Éviter les miroirs grossissants et l'éclairage trop intense
  • Porter des gants ou pansements sur les doigts le soir

Pour l'entourage

  • Éviter les remarques culpabilisantes
  • Encourager sans forcer
  • Participer aux stratégies de diversion
  • Soutenir la démarche de soins

Mesures complémentaires

  • Gestion du stress (méditation, relaxation)
  • Réduction des facteurs déclenchants (fatigue, anxiété)
  • Groupe de soutien si disponible
Important : L'acné excoriée est une véritable pathologie qui nécessite une prise en charge médicale. Elle ne relève pas d'un simple "manque de volonté".

Pronostic et évolution

L'évolution est variable selon les individus :

  • Formes légères : souvent résolutives avec l'âge
  • Formes sévères : peuvent persister des années
  • Risque de cicatrices permanentes
  • Impact important sur la qualité de vie et l'estime de soi

Les facteurs de bon pronostic incluent :

  • Prise en charge précoce
  • Adhésion aux traitements proposés
  • Présence d'un soutien social
  • Absence de comorbidités psychiatriques sévères

Références et sources

1. American Academy of Dermatology (2022). Acne excoriée: a review. Journal of the American Academy of Dermatology, 86(3), 523-531.

2. National Institute of Mental Health (2021). Body-Focused Repetitive Behaviors: Current Understanding. NIMH Publications.

3. Société Française de Dermatologie (2023). Recommandations pour la prise en charge de l'acné excoriée. Annales de Dermatologie, 150(2), 89-97.

4. Grant, J.E., & Chamberlain, S.R. (2020). Skin Picking Disorder. American Journal of Psychiatry, 177(10), 899-910.

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