Pneumonie organisée cryptogénique (COP)
La pneumonie organisée cryptogénique (COP), anciennement appelée bronchiolite oblitérante avec pneumonie organisée (BOOP), est une maladie pulmonaire rare caractérisée par une inflammation des petites voies aériennes (bronchioles) et des alvéoles pulmonaires. Elle fait partie du groupe des pneumonies interstitielles idiopathiques et présente un pronostic généralement favorable avec un traitement approprié.
Définition et caractéristiques
La pneumonie organisée cryptogénique est une entité nosologique bien définie caractérisée par :
- La présence de bourgeons de tissu conjonctif (corps de Masson) dans les bronchioles et les canaux alvéolaires
- Une inflammation chronique de l'interstitium pulmonaire
- Une présentation clinique et radiologique caractéristique
- Une réponse généralement bonne aux corticostéroïdes
Le terme "cryptogénique" signifie que la cause est inconnue, bien que des formes secondaires de pneumonie organisée existent en association avec diverses affections.
Formes cliniques
On distingue deux principales formes de COP :
- Forme focale : Présentation localisée, souvent asymptomatique
- Forme diffuse : Atteinte bilatérale avec symptômes respiratoires marqués
Symptômes et présentation clinique
Les symptômes de la COP sont souvent non spécifiques et peuvent imiter ceux d'une pneumonie infectieuse ou d'une autre maladie pulmonaire. La présentation typique inclut :
- Toux sèche ou peu productive (70-80% des cas)
- Dyspnée (essoufflement) d'effort (50-70%)
- Fièvre modérée (50%)
- Perte de poids (30-50%)
- Fatigue et malaise général
- Douleur thoracique (20%)
- Hémoptysie (rare)
L'évolution est généralement subaiguë, avec des symptômes présents depuis plusieurs semaines ou mois avant le diagnostic.
Diagnostic
Le diagnostic de COP repose sur une combinaison de critères cliniques, radiologiques et histologiques. Aucun test isolé n'est pathognomonique, ce qui rend le diagnostic parfois difficile.
Examens d'imagerie
La radiographie thoracique et la tomodensitométrie (TDM) thoracique sont essentielles au diagnostic :
- Radiographie thoracique : Opacités alvéolaires bilatérales, souvent périphériques et migratrices
- TDM thoracique haute résolution : Lésions en verre dépoli, consolidations avec bronchogramme aérien, souvent sous-pleurales ou péri-bronchovasculaires
Examens biologiques
Les analyses biologiques peuvent révéler :
- Syndrome inflammatoire (élévation de la VS et de la CRP)
- Hyperleucocytose modérée
- Élévation des LDH (non spécifique)
Explorations fonctionnelles respiratoires
Les explorations fonctionnelles respiratoires (EFR) montrent typiquement :
- Un syndrome restrictif (60-80% des cas)
- Une diminution de la DLCO (diffusion du CO)
- Parfois un syndrome obstructif (20%)
Examen anatomopathologique
La confirmation histologique par biopsie pulmonaire (chirurgicale ou transbronchique) est souvent nécessaire et montre :
- Bourgeons fibroblastiques dans les bronchioles et les canaux alvéolaires
- Inflammation interstitielle chronique
- Préservation de l'architecture pulmonaire
Diagnostic différentiel
La COP doit être distinguée de :
Pathologie | Éléments distinctifs |
---|---|
Pneumonie infectieuse | Début plus aigu, fièvre plus élevée, réponse aux antibiotiques |
Pneumopathie d'hypersensibilité | Contexte d'exposition, granulomes à la biopsie |
Sarcoïdose | Granulomes épithélioïdes non caséeux, atteinte multi-organes |
Cancer bronchique | Évolution progressive, masse à l'imagerie |
Fibrose pulmonaire idiopathique | Évolution progressive, aspect en rayon de miel à la TDM |
Traitement
Le traitement de première intention de la COP repose sur les corticostéroïdes, avec une réponse généralement bonne mais nécessitant souvent un traitement prolongé pour prévenir les rechutes.
Traitement médicamenteux
- Corticostéroïdes :
- Prednisone (ou équivalent) à la dose de 0.5-1 mg/kg/jour (30-60 mg/j) pendant 2-4 semaines
- Dégressivité progressive sur 6-12 mois
- Taux de réponse > 80%
- Immunosuppresseurs : En cas de contre-indication aux corticoïdes ou de réponse incomplète (azathioprine, mycophénolate mofétil)
- Macrolides : Possibilité d'effet bénéfique dans certaines formes (clarithromycine)
Prise en charge non médicamenteuse
- Arrêt du tabac impératif
- Vaccination contre la grippe et le pneumocoque
- Réhabilitation respiratoire si séquelles fonctionnelles
- Surveillance régulière clinique et radiologique
Pronostic et évolution
Le pronostic de la COP est généralement bon avec traitement :
- Réponse clinique rapide aux corticoïdes dans la majorité des cas
- Amélioration radiologique souvent complète
- Récupération fonctionnelle fréquente
- Taux de survie à 5 ans > 90%
Cependant, certains facteurs peuvent influencer négativement le pronostic :
- Formes extensives avec atteinte pulmonaire sévère
- Retard au diagnostic et au traitement
- Présence de comorbidités respiratoires
- Rechutes fréquentes nécessitant un traitement prolongé
Conseils et recommandations
Pour les patients
- Respecter scrupuleusement le traitement prescrit et ne pas l'interrompre sans avis médical
- Signaler rapidement toute aggravation des symptômes ou effet secondaire du traitement
- Maintenir une activité physique adaptée à sa condition respiratoire
- Éviter tout tabagisme (actif et passif)
- Faire les vaccinations recommandées
- Consulter rapidement en cas d'infection respiratoire
Pour les médecins
- Évoquer le diagnostic devant des opacités pulmonaires récidivantes ou migratrices
- Rechercher systématiquement une cause secondaire avant de retenir le diagnostic de forme cryptogénique
- Privilégier une décroissance très progressive des corticoïdes
- Surveiller les effets secondaires du traitement corticoïde au long cours
- Envisager une biopsie pulmonaire en cas de doute diagnostique
Recherche et perspectives
Les recherches actuelles sur la COP portent sur :
- Les mécanismes physiopathologiques précis de la maladie
- Les marqueurs pronostiques de réponse au traitement et de rechute
- Les alternatives thérapeutiques aux corticoïdes
- Les facteurs génétiques potentiellement impliqués
- Les liens avec d'autres pathologies pulmonaires interstitielles
Références et sources
1. American Thoracic Society/European Respiratory Society International Multidisciplinary Consensus Classification of the Idiopathic Interstitial Pneumonias (2002)
2. Cottin V, Cordier JF. Cryptogenic organizing pneumonia. Semin Respir Crit Care Med. 2012;33(5):462-475.
3. Epler GR. Bronchiolitis obliterans organizing pneumonia. Arch Intern Med. 2001;161(2):158-164.
4. Sverzellati N, et al. American Journal of Roentgenology. 2011;196(4):773-787.
5. Société de Pneumologie de Langue Française. Recommandations pour le diagnostic et la prise en charge des pneumopathies interstitielles diffuses (2013)