L’anorexie mentale - Santé et Maladie

L’anorexie mentale

L'anorexie mentale : Comprendre, Diagnostiquer et Traiter

Jeune femme fragile regardant dans un miroir

L'anorexie mentale est un trouble du comportement alimentaire (TCA) complexe et multifactoriel qui représente un enjeu majeur de santé publique. Caractérisée par une restriction alimentaire volontaire et une peur intense de prendre du poids, cette maladie peut avoir des conséquences physiques et psychologiques graves. Cet article explore en profondeur tous les aspects de l'anorexie mentale, de sa définition aux traitements disponibles.

Définition et épidémiologie

L'anorexie mentale est définie par le DSM-5 (Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux) comme un trouble alimentaire caractérisé par :

  • Une restriction des apports énergétiques conduisant à un poids corporel significativement bas
  • Une peur intense de prendre du poids ou de devenir gros
  • Une altération de la perception du poids ou de la forme corporelle
L'anorexie mentale touche environ 0,9% des femmes et 0,3% des hommes au cours de leur vie. Elle débute le plus souvent à l'adolescence (entre 13 et 17 ans) mais peut survenir à tout âge.

Formes cliniques

On distingue deux sous-types principaux :

  • Type restrictif : le patient limite sévèrement son alimentation sans recours aux crises de boulimie ou aux comportements de purge
  • Type avec crises de boulimie/vomissements : le patient alterne périodes de restriction et épisodes de consommation incontrôlée de nourriture suivis de comportements compensatoires (vomissements, laxatifs, exercice excessif)

Diagnostic et symptômes

Balance et ruban de mesure

Critères diagnostiques

Le diagnostic repose sur des critères cliniques établis par le DSM-5 :

  • Restriction des apports caloriques menant à un poids significativement bas (IMC ≤ 17,5 kg/m² chez l'adulte)
  • Peur intense de prendre du poids ou de devenir gros malgré l'insuffisance pondérale
  • Altération de la perception du poids ou de la forme corporelle
  • Influence excessive du poids sur l'estime de soi
  • Absence de reconnaissance de la gravité de la maigreur actuelle

Symptômes cliniques

Les manifestations de l'anorexie mentale sont multiples :

  • Symptômes physiques : amaigrissement, aménorrhée (absence de règles), fatigue, frilosité, chute de cheveux, peau sèche, ongles cassants, lanugo (pilosité fine sur le corps)
  • Symptômes psychologiques : obsession pour la nourriture, rituels alimentaires, isolement social, irritabilité, dépression, anxiété
  • Symptômes comportementaux : restriction alimentaire, exercice physique excessif, mensonges sur l'alimentation, port de vêtements amples
Attention : L'anorexie mentale a le taux de mortalité le plus élevé parmi tous les troubles psychiatriques (5 à 10% des cas). Une prise en charge précoce est essentielle.

Bilans et examens complémentaires

Bilan biologique

Plusieurs perturbations peuvent être observées :

  • Hémogramme : anémie, leucopénie
  • Ionogramme : hypokaliémie (en cas de vomissements), hyponatrémie
  • Fonction rénale : élévation de l'urée
  • Fonction hépatique : transaminases parfois élevées
  • Bilan endocrinien : baisse des hormones thyroïdiennes, cortisol élevé, œstrogènes/testostérone bas

Examens complémentaires

  • Densitométrie osseuse : pour évaluer l'ostéopénie/ostéoporose
  • ECG : recherche de troubles du rythme (allongement du QT)
  • Imagerie cérébrale : en cas de doute diagnostique

Traitements et prise en charge

Main tenant une autre main en signe de soutien

La prise en charge de l'anorexie mentale doit être multidisciplinaire et adaptée à la sévérité du trouble. Elle associe plusieurs approches complémentaires.

Prise en charge nutritionnelle

  • Réalimentation progressive sous surveillance médicale
  • Supplémentation en vitamines et minéraux si nécessaire
  • Éducation nutritionnelle
  • Objectif de poids cible individualisé

Psychothérapies

Plusieurs approches ont démontré leur efficacité :

  • Thérapie cognitivo-comportementale (TCC) : travail sur les distorsions cognitives et les comportements problématiques
  • Thérapie familiale : particulièrement chez les adolescents
  • Thérapie interpersonnelle : travail sur les relations sociales
  • Thérapies corporelles : pour améliorer l'image de soi

Traitements médicamenteux

Aucun médicament ne traite spécifiquement l'anorexie, mais certains peuvent aider :

  • Antidépresseurs (en cas de dépression comorbide)
  • Anxiolytiques (ponctuellement)
  • Suppléments nutritionnels (vitamines, minéraux)

Hospitalisation

Elle est nécessaire dans les cas sévères :

  • IMC < 13 kg/m² ou perte de poids rapide
  • Complications médicales sévères
  • Risque suicidaire
  • Échec des traitements ambulatoires

Conseils et recommandations

Pour les patients

  • Reconnaître le problème est la première étape vers la guérison
  • Chercher de l'aide professionnelle sans tarder
  • S'entourer de personnes de confiance
  • Éviter l'isolement social
  • Se fixer des objectifs progressifs et réalisables

Pour l'entourage

  • Éviter les commentaires sur le poids ou l'apparence
  • Manifester son soutien sans jugement
  • Encourager la personne à consulter
  • Se renseigner sur la maladie
  • Prendre soin de soi (groupes de parole pour proches)
Bon à savoir : Le rétablissement complet est possible, même après plusieurs années d'évolution. Environ 50% des patients guérissent complètement, 30% s'améliorent significativement et 20% gardent une forme chronique.

Pronostic et complications

L'évolution de l'anorexie mentale est variable. Les facteurs de bon pronostic incluent un diagnostic précoce, une motivation au changement et un bon soutien familial. Les complications potentielles sont nombreuses :

  • Cardiovasculaires : bradycardie, hypotension, troubles du rythme
  • Osseuses : ostéoporose, fractures
  • Métaboliques : déséquilibres électrolytiques
  • Psychiatriques : dépression, anxiété, risque suicidaire
  • Reproductives : infertilité, complications de grossesse

Références et sources

1. DSM-5, American Psychiatric Association (2013)

2. Haute Autorité de Santé - Anorexie mentale : prise en charge (2010)

3. INSERM - Troubles des conduites alimentaires (2019)

4. National Eating Disorders Association (NEDA)

5. Treasure J et al. Eating disorders. Lancet (2020)

Images : Unsplash (libres de droits)