Le cancer du col de l'utérus : Comprendre, Diagnostiquer et Traiter
Le dépistage précoce est crucial dans la lutte contre le cancer du col de l'utérus
Le cancer du col de l'utérus représente un enjeu majeur de santé publique mondiale. Bien qu'il soit largement évitable grâce au dépistage et à la vaccination, il reste l'un des cancers les plus fréquents chez la femme. Cet article complet aborde tous les aspects de cette maladie, de sa définition aux traitements actuels, en passant par les moyens de prévention.
Définition et épidémiologie
Qu'est-ce que le cancer du col de l'utérus ?
Le cancer du col de l'utérus (ou cancer cervical) se développe à partir des cellules de la partie inférieure de l'utérus qui fait saillie dans le vagin. Il s'agit dans 90% des cas d'un carcinome épidermoïde (développé à partir des cellules squameuses), et dans 10% des cas d'un adénocarcinome (développé à partir des cellules glandulaires).
À savoir : Le cancer du col utérin est le 4ème cancer le plus fréquent chez la femme dans le monde selon l'OMS, avec environ 570 000 nouveaux cas et 311 000 décès par an.
Facteurs de risque
Plusieurs facteurs augmentent le risque de développer un cancer du col de l'utérus :
- Infection par le papillomavirus humain (HPV) : responsable de près de 100% des cas (notamment les types 16 et 18)
- Tabagisme (multiplie le risque par 2 à 4)
- Déficit immunitaire (VIH, traitements immunosuppresseurs)
- Multiplicité des partenaires sexuels
- Premiers rapports sexuels précoces
- Antécédents d'infections sexuellement transmissibles
- Utilisation prolongée de contraceptifs oraux (plus de 5 ans)
Le papillomavirus humain (HPV) est la cause principale du cancer du col
Symptômes et diagnostic
Signes cliniques
Dans les stades précoces, le cancer du col est souvent asymptomatique. Lorsque les symptômes apparaissent, on peut observer :
- Saignements vaginaux anormaux (en dehors des règles, après les rapports sexuels ou après la ménopause)
- Pertes vaginales inhabituelles (teintées de sang, malodorantes)
- Douleurs pelviennes ou pendant les rapports sexuels
- Symptômes des stades avancés : œdème des membres inférieurs, troubles urinaires ou rectaux
Attention : L'absence de symptômes ne signifie pas absence de maladie. Seul un dépistage régulier permet de détecter les lésions précancéreuses avant qu'elles n'évoluent en cancer.
Méthodes de diagnostic
Le diagnostic repose sur plusieurs examens complémentaires :
1. Frottis cervico-vaginal (FCV)
Examen de dépistage qui permet de détecter des cellules anormales. Recommandé tous les 3 ans entre 25 et 65 ans après deux frottis normaux à 1 an d'intervalle.
2. Colposcopie
Examen visuel du col au microscope après application de solutions (acide acétique et lugol) pour identifier les zones anormales.
3. Biopsie
Prélèvement d'un fragment de tissu pour analyse histologique. Peut être dirigée (sous colposcopie) ou consistante (conisation).
4. Test HPV
Détection de l'ADN des HPV à haut risque. De plus en plus utilisé comme test de dépistage primaire.
Le frottis cervico-vaginal est l'examen clé du dépistage
Bilan d'extension
Une fois le diagnostic confirmé, des examens complémentaires évaluent l'extension de la maladie :
- Examen clinique complet : toucher vaginal et rectal
- IRM pelvienne : pour évaluer l'extension locale
- Scanner thoraco-abdomino-pelvien : recherche de métastases
- TEP-scan : dans certains cas pour détecter des atteintes ganglionnaires ou métastatiques
- Cystoscopie/Rectoscopie : si suspicion d'envahissement vésical ou rectal
Classification et stades
Le cancer du col est classé selon le système FIGO (Fédération Internationale de Gynécologie et d'Obstétrique) :
- Stade I : limité au col utérin
- Stade II : extension au-delà de l'utérus mais sans atteindre la paroi pelvienne
- Stade III : extension à la paroi pelvienne ou au tiers inférieur du vagin
- Stade IV : extension aux organes adjacents ou présence de métastases à distance
Traitements
Le choix du traitement dépend du stade de la maladie, de l'âge de la patiente et de son désir de grossesse.
1. Traitement des lésions précancéreuses
- Conisation : ablation d'une partie du col en forme de cône (au laser, au bistouri froid ou par anse diathermique)
- Vaporisation laser : destruction des lésions par laser
- Cryothérapie : destruction par le froid
2. Traitement des cancers localisés (stade I)
- Chirurgie : hystérectomie élargie (ablation de l'utérus, du tiers supérieur du vagin et des paramètres) avec lymphadénectomie pelvienne
- Radiothérapie exclusive : pour les patientes non opérables
- Traitement conservateur : trachélectomie élargie (ablation du col et du tiers supérieur du vagin) pour les femmes désirant une grossesse
3. Traitement des cancers localement avancés (stade II-IVA)
- Radiothérapie externe + curiethérapie (radiothérapie interne)
- Chimiothérapie concomitante (à base de cisplatine) pour potentialiser les effets de la radiothérapie
4. Traitement des cancers métastatiques (stade IVB)
- Chimiothérapie palliative (associant souvent cisplatine et paclitaxel)
- Thérapies ciblées (bévacizumab)
- Traitements symptomatiques et soins de support
Les progrès thérapeutiques ont amélioré le pronostic de ce cancer
Pronostic et suivi
Le pronostic dépend principalement du stade au diagnostic :
- Stade I : survie à 5 ans de 80-95%
- Stade II : 60-75%
- Stade III : 30-50%
- Stade IV : moins de 20%
Le suivi post-traitement comprend :
- Examen clinique tous les 3-4 mois pendant 2 ans, puis tous les 6 mois jusqu'à 5 ans
- Frottis cervico-vaginal tous les 6 mois
- Imagerie en cas de suspicion de récidive
Prévention et recommandations
1. Vaccination contre le HPV
Recommandée pour :
- Les filles et les garçons entre 11 et 14 ans (schéma à 2 doses)
- Rattrapage possible jusqu'à 19 ans (schéma à 3 doses)
- Jeunes femmes jusqu'à 26 ans non vaccinées
Efficacité : Les vaccins (Gardasil 9, Cervarix) protègent contre les types de HPV les plus oncogènes (16 et 18) responsables de 70% des cancers du col.
2. Dépistage organisé
En France, le programme national recommande :
- De 25 à 29 ans : frottis tous les 3 ans après 2 frottis normaux à 1 an d'intervalle
- De 30 à 65 ans : test HPV tous les 5 ans (ou frottis tous les 3 ans si test HPV non disponible)
3. Mesures complémentaires
- Utilisation de préservatifs (réduit mais n'élimine pas le risque de transmission du HPV)
- Arrêt du tabac
- Information et éducation sexuelle
Important : Même vaccinée, une femme doit participer au dépistage car le vaccin ne protège pas contre tous les types de HPV oncogènes.
Recherche et perspectives
Les axes de recherche actuels incluent :
- Développement de vaccins thérapeutiques
- Nouvelles combinaisons de chimiothérapies
- Immunothérapies (inhibiteurs de checkpoints)
- Amélioration des techniques de radiothérapie
- Stratégies de dépistage dans les pays à ressources limitées (test HPV en auto-prélèvement)
Sources et références :
1. Organisation Mondiale de la Santé (OMS) - Guide des cancers du col de l'utérus (2021)
2. Institut National du Cancer (INCa) - Dépistage du cancer du col de l'utérus (2022)
3. Haute Autorité de Santé (HAS) - Recommandations vaccinales contre les HPV (2023)
4. Société Française de Pathologie - Classification histologique des tumeurs du col (2020)
5. European Society for Medical Oncology (ESMO) - Guidelines on cervical cancer (2022)
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