La dyspraxie : Comprendre et accompagner
La dyspraxie, souvent méconnue du grand public, est un trouble neurologique qui affecte la planification et l'exécution des mouvements volontaires. Ce trouble du développement, qui persiste à l'âge adulte, impacte significativement la vie quotidienne, scolaire et professionnelle des personnes concernées. Dans cet article, nous explorerons en détail tous les aspects de la dyspraxie, de sa définition à sa prise en charge.
Qu'est-ce que la dyspraxie ?
La dyspraxie, également appelée Trouble Développemental de la Coordination (TDC), est un trouble spécifique du développement qui affecte la coordination motrice sans qu'il y ait de déficit intellectuel ou neurologique apparent. Elle fait partie des troubles "dys" (dyslexie, dyscalculie, dysorthographie...).
Le terme "dyspraxie" vient du grec "dys" (difficulté) et "praxis" (action). Elle est parfois surnommée "le handicap invisible" car les difficultés ne sont pas immédiatement apparentes.
On distingue plusieurs types de dyspraxie :
- Dyspraxie idéatoire : difficulté à concevoir l'enchaînement des gestes
- Dyspraxie idéomotrice : difficulté à exécuter un geste sur commande
- Dyspraxie visuo-spatiale : troubles de la coordination oculo-manuelle et de l'organisation spatiale
- Dyspraxie constructive : difficultés dans l'assemblage d'éléments
- Dyspraxie de l'habillage : problèmes pour s'habiller seul
Symptômes et manifestations
Les symptômes de la dyspraxie varient selon les individus et l'âge, mais on observe généralement :
Chez l'enfant
- Retard dans l'acquisition de la marche
- Difficultés pour s'habiller, faire ses lacets, boutonner
- Maladresse fréquente (fait tomber des objets, se cogne)
- Problèmes pour écrire (lenteur, illisibilité)
- Difficultés en sport et jeux de ballon
- Fatigue importante en fin de journée
Chez l'adulte
- Difficultés de conduite automobile
- Problèmes d'organisation dans les tâches quotidiennes
- Écriture peu lisible ou lente
- Difficultés à utiliser des outils ou appareils
- Problèmes pour suivre une chorégraphie ou des mouvements complexes
La dyspraxie s'accompagne souvent d'autres troubles : troubles de l'attention (TDA/H), dyslexie, dyscalculie, ou troubles visuo-spatiaux. Ce phénomène est appelé comorbidité.
Diagnostic et bilans
Le diagnostic de la dyspraxie est pluridisciplinaire et repose sur plusieurs étapes :
1. Bilan médical
Un pédiatre, neuropédiatre ou médecin généraliste élimine d'abord d'autres causes possibles (troubles neurologiques, musculaires...).
2. Bilan psychomoteur
Réalisé par un psychomotricien, il évalue la motricité globale et fine, la latéralité, le schéma corporel, l'organisation spatiale et temporelle.
3. Bilan ergothérapique
L'ergothérapeute analyse les capacités fonctionnelles dans les activités quotidiennes.
4. Bilan orthoptique
Évalue les troubles visuo-spatiaux souvent associés.
5. Bilan neuropsychologique
Teste les fonctions cognitives (attention, mémoire, fonctions exécutives).
Traitements et prises en charge
Bien qu'il n'existe pas de "remède" à la dyspraxie, une prise en charge précoce et adaptée permet d'améliorer significativement les capacités et la qualité de vie.
Rééducation
- Psychomotricité : travail sur le schéma corporel, la coordination, l'équilibre
- Ergothérapie : adaptation des gestes du quotidien et compensation des difficultés
- Orthoptie : pour les troubles visuo-spatiaux associés
- Orthophonie : si troubles du langage oral ou écrit associés
Adaptations scolaires
- Utilisation d'un ordinateur avec logiciel de reconnaissance vocale
- Temps supplémentaire pour les examens
- Autorisation d'utiliser des outils adaptés (règle, compas spécial...)
- Éviter de faire copier de longs textes
- Privilégier l'oral pour les évaluations
Thérapies complémentaires
- Thérapie cognitive et comportementale (gestion du stress et de l'estime de soi)
- Groupes d'habiletés sociales
- Activités artistiques ou sportives adaptées
Conseils et recommandations
Pour les parents
- Encouragez les efforts plutôt que les résultats
- Fractionnez les tâches complexes en étapes simples
- Utilisez des repères visuels (emploi du temps, codes couleur)
- Favorisez l'autonomie en adaptant l'environnement (vêtements faciles à enfiler, outils ergonomiques)
- Valorisez les domaines où l'enfant excelle
Pour les enseignants
- Placez l'élève près du tableau et loin des distractions
- Autorisez l'utilisation d'outils adaptés
- Donnez des consignes courtes et vérifiez leur compréhension
- Évitez de faire noter les leçons (fournissez des photocopies)
- Valorisez les compétences autres que motrices
Pour les adultes dyspraxiques
- Organisez votre espace de travail de manière fixe et logique
- Utilisez des aides technologiques (logiciels de dictée, rappels électroniques)
- Prévoyez plus de temps pour les tâches complexes
- Expliquez vos difficultés à votre entourage professionnel
- Développez des stratégies compensatoires
La dyspraxie est reconnue comme un handicap par la Maison Départementale des Personnes Handicapées (MDPH). Des aménagements scolaires, professionnels et des aides financières peuvent être demandés.
Évolution et perspectives
La dyspraxie ne disparaît pas avec l'âge, mais ses manifestations évoluent. Grâce aux stratégies compensatoires acquises, de nombreux adultes dyspraxiques mènent une vie personnelle et professionnelle épanouie. La recherche continue d'explorer les causes neurologiques de la dyspraxie et développe de nouvelles méthodes d'intervention.
Sources et références :
- Fédération Française des Dys (FFDys) - www.ffdys.com
- Inserm - Dossier sur les troubles des apprentissages
- Haute Autorité de Santé - Guide sur le Trouble Développemental de la Coordination
- Association Dyspraxique Mais Fantastique (DMF) - www.dyspraxie.info
- Ministère de l'Éducation nationale - Ressources pour scolariser les élèves handicapés
- American Psychiatric Association - DSM-5